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Recherche sur les drogues injectables

Des experts en discutent à Longueuil

6 décembre 2007

Important problème de santé publique à travers le monde, l'injection de drogues engendre de graves conséquences sur les plans social, personnel et sanitaire, notamment en contribuant de manière importante à la propagation des épidémies de VIH-sida et d'hépatite C. À l'invitation d'Élise Roy, directrice du Service de toxicomanie de la Faculté de médecine et des sciences de la santé, et grâce à l'animation de Jean-François Boivin, de l'Université McGill, un séminaire international de recherche sur l'injection comme mode de consommation de drogues s'est tenu au début novembre au Campus de Longueuil. Pour l'occasion, neuf experts universitaires et professionnels de six pays, dont l'Angleterre, l'Espagne, les États-Unis et la Hollande, ont pu faire le point sur les connaissances actuelles en ce qui concerne les dimensions individuelles et sociales expliquant l'injection de drogues et les interventions préventives.

Au cours de la 1re journée du séminaire, les experts ont présenté les résultats de leurs plus récentes recherches de type étiologique sur le phénomène. Ainsi, ils tentent de faire des liens entre la trajectoire de consommation des jeunes et leur rapport à la rue. La professeure Roy mentionne : «Ces recherches sont effectuées dans le but d'obtenir des retombées concrètes et utiles, tant sur le plan des services que de la pratique. Par exemple, ces études ont servi à la création d'une campagne de prévention, réalisée en 2005 puis reprise en 2007, ciblant les jeunes de la rue susceptibles d'utiliser l'injection comme mode de consommation de drogues.»

Une étude réalisée de 1995 à 2000 a permis de constater le fort taux de mortalité des jeunes de la rue. «Il y a 11 fois plus de jeunes de la rue qui meurent comparativement aux autres jeunes. Cette étude a révélé, entre autres, que vivre dans la rue constitue un facteur de risque de mort précoce», observe-t-elle. Les subventions accordées par le ministère de la Santé et des Services sociaux à la suite de la présentation de ces résultats de recherche ont permis à des experts de se réunir afin de trouver des moyens de réduire le taux de mortalité chez les jeunes de la rue.

Prévenir le passage à l'injection

La 2e journée a été l'occasion d'examiner les quelques exemples d'interventions visant à prévenir le passage à l'injection qui existent à travers le monde. Il a été possible de dégager des facteurs sociaux, économiques et culturels pouvant expliquer les proportions d'injecteurs et les transitions vers l'injection comme mode principal de consommation de drogues. «La substance et sa forme, en lien avec le marché de la drogue, représentent l'un des facteurs sociaux. Certaines drogues sont plus injectables que d'autres», précise Élise Roy. De plus, le prix des drogues est un facteur économique important. «Une drogue moins pure va coûter moins cher, mais va être moins efficace. L'injection va compenser la mauvaise qualité de la drogue. À court terme, elle constitue un mode de consommation économique et efficace, mais accélère la dépendance», ajoute-t-elle.

Bien que les tenants et aboutissants de l'injection soient de plus en plus connus, la progression des recherches tend à illustrer la complexité de ce phénomène. «Des experts se sont intéressés à des populations différentes, mais il n'y a pas de facteurs uniques expliquant l'utilisation de l'injection comme mode de consommation de drogues», mentionne Élise Roy. C'est pourquoi les experts ont conclu que, pour le moment, il est difficile de dégager des définitions très claires de ce qu'implique, par exemple, une transition vers l'injection de drogues.

«Toutefois, ce qui est rassurant, c'est que nous remarquons certaines constantes dans les résultats de recherche», indique-t-elle. Ainsi, les experts s'entendent pour privilégier certaines pistes telles que l'emploi combiné de différentes méthodes de recherche pour une population donnée ou le recours à des recherches en simultané sur plusieurs sites afin d'être en mesure d'étudier diverses populations avec des bases comparatives similaires. C'est également dans cette voie que semble s'orienter le développement des interventions préventives. On constate une volonté de déployer de par le monde une série d'interventions adaptées visant à réduire la consommation de drogue.

Après deux jours d'échange, les experts internationaux ont exprimé le souhait de jeter les bases d'une collaboration soutenue. Dans l'immédiat, une première démarche consiste à soumettre pour publication un article synthèse dans une revue scientifique à rayonnement international.